Interview – Cyril Marchiol
Cyril Marchiol
Après avoir géré une entreprise d'importation de produits dérivés, puis été l'agent européen de l'éditeur japonais Art of War, Cyril Marchiol crée en 2010 la société Tsume. Située au Luxembourg, la société a pour but de s’imposer dans le marché de la statuette de collection.Que représentait le Japon pour toi avant d’y poser le pied ?
Comme beaucoup de monde j’imagine, le Japon c’était pour moi une sorte d’Eldorado. Je suis entré dans la culture japonaise par le jeu vidéo, grâce à mon grand frère. Alors forcément, quand tu penses à Tokyo, tu penses à tous les game centers avec des joueurs ultra balèzes, tu penses aux boutiques où tu pourras trouver des jeux rares. Surtout quand, comme moi, tu es un gros fan de PC Engine ! Et puis bien sûr, tu penses aux boutiques mangas et à tout ça. Mais surtout, je me disais que ce serait l’occasion de voir par moi-même le pays et sa culture, plutôt que rester sur l’image qu’on en a vu d’ici. Donc pour répondre à ta question, le Japon représentait pour moi la possibilité de découvrir une nouvelle culture que je savais déjà richissime, tout en concrétisant un rêve de gamin.
Quel fut ton premier choc en arrivant sur le sol nippon ?
Là aussi, j’imagine que je ne serai pas le premier à te dire ça, mais ce qui m’a le plus marqué en arrivant, ce sont la propreté et le respect ! Tu arrives là-bas après un long trajet en avion. Tu es crevé, et tu débarques dans un pays où les gens sont extrêmement polis, courtois et bienveillants. Bien sûr, c’est une généralité et on trouvera toujours des contre-exemples, mais dans les boutiques les gens sont serviables et respectueux. Dans la rue, les gens sont peut-être pressés mais s’ils te voient perdus, ils viendront t’aider. J’ai bien conscience qu’étant un touriste, ce comportement ne reflète peut-être pas la réalité du quotidien, mais j’ai toujours ressenti beaucoup de bienveillance à mon égard. Et ça, c’est hyper important. Ça apporte une sérénité et du calme alors qu’on est en pleine métropole. Je ne ressens pas la même chose quand je vais à Paris.
Peux-tu nous raconter l’expérience la plus insolite que tu as vécue au Japon ?
Après une soirée bien chargée en Biiru au 911 sur Roppongi à l’époque, un ami ne nous voyait plus sur la piste de danse après être revenu des toilettes. Il a eu peur de se retrouver seul et a appelé un Taxi pour Asakusa. Seul souci, on était à Akasaka… L’autre côté de Tokyo. Le voyage étant un peu long, il a demandé plusieurs fois au chauffeur de s’arrêter car il ne se sentait pas bien. Au bout d’un moment, le chauffeur ne voulait plus ouvrir. Du coup, le taxi a découvert une spécialité bien française, la galette des rois.
Moralité : Attention aux nombreuses appellations assez similaires… ^^
J’ai jamais autant rigolé de ma vie…D’ailleurs, il se marie bientôt, ça me fera un joli dossier à ressortir, hein Romain !
Quelles sont pour toi les icônes de la pop culture japonaise ?
Les icônes pour moi sont liées clairement à mon milieu, j’y suis beaucoup plus sensible, forcément. Là je pense à Toriyama (Akira), Oda (Eiichiro), Kishimoto (Masashi) qui ont clairement changé ma vie. Mais aussi Kojima (Hideo), Miyamoto (Shigeru, pas Musashi !) et tous les autres qui ont créé de véritables codes dont tout le monde s’inspire aujourd’hui. Ce sont plus que des icônes.
Dans le milieu musical, je continue de suivre Crossfaith entre autres.
Avant de concevoir tes propres figurines en fondant Tsume, tu pratiquais l’import de produits japonais. Qu’est-ce qui t’a fait sauter le pas ?
En fait, c’est assez simple. À force d’importer des produits, tu finis par avoir envie de faire les tiens. J’ai toujours été créatif dans mes démarches, je pense qu’il n’y a aucune limite à la création.
Après quelques temps passé à travailler comme importateur officiel de Art of War, j’ai eu envie de proposer aux gens des produits qui n’existaient pas : des statues que j’aurais acheté moi-même si quelqu’un les avaient proposés. Du coup, je me suis lancé et malgré les défis que ça a représenté pendant les sept dernières années, je ne regrette absolument pas !
Pour toi, une belle figurine c’est… ?
Je suis de plus en plus persuadé que plus qu’une belle figurine, il faut penser au lien qu’on développe, pas uniquement dans le produit, mais dans la relation qu’on a avec les gens.
C’est une pièce qui te fait vibrer quand tu la vois, une pièce qui te provoque une émotion. En tout cas, c’est ce que j’essaie de faire avec mon équipe pour chacune des créations qui sort de nos ateliers. Ce que je veux avec chaque statue que je conçois, c’est que la personne qui la déballe sente que les gens qui ont bossé dessus aiment l’univers autant que lui et qu’ils ne se sont pas moqués de lui.
Quelles sont les licences dont tu es le plus fier ?
Je suis tellement impliqué dans chaque projet que c’est difficile de choisir. Mais bon, si j’essaie de répondre à ta question je citerai deux séries. Naruto Shippuden, parce que c’est une œuvre que je trouve magistrale et incroyable. Et c’est la première licence que j’ai signé à Tsume. Et ça, c’est juste magique. Je suis ultra fan de Naruto et c’est un vrai bonheur que de bosser dessus depuis le début de l’aventure Tsume. La seconde série, c’est Dragon Ball Z, forcément ! L’impact de cette série aussi bien en France que sur moi, plus particulièrement, est inimaginable ! De plus, c’était une sorte de Graal, de rêve qu’on nous avait dit inaccessible. Alors je suis hyper content d’avoir pu signer cette licence et de pouvoir la travailler comme je veux. C’est pour ça qu’on l’a tellement mise en avant durant les Tsume Fan Days 3. Et ça aussi c’était incroyable : convaincre les ayants-droits de nous laisser faire des statues taille réelle de leurs personnages ! Ça n’arrive jamais, en principe.
De quoi sera fait l’avenir de Tsume ?
De nouveaux défis à relever ! On vient de dévoiler une nouvelle marque : Tsume Entertainment, dédiée à l’événementiel et à la vidéo. Iki et Yoka, nos marques de textile et de jeux de société, qui débutent à peine. Les Tsume Live que je veux encore améliorer, et plein de surprises dont je ne peux pas te parler encore !
Revenons au Japon. Quels conseils donnerais-tu à celles et ceux qui préparent un voyage sur l’archipel ?
Prenez de l’avance sur le sommeil car vous allez voir tellement de choses dingues que vous n’allez pas vouloir dormir beaucoup, une fois sur place.
On va se quitter avec une petite faim. Quelle est ta spécialité culinaire japonaise préférée ?
Je suis un gros fan du Gyudon ! Riz, lamelles de bœuf, oignon et œuf à cheval… mmmm !!